Émilie Coutant

Née en France en 1985, Emilie Coutant a attendu 9 ans avant de découvrir les Orients mystiques en s'installant avec sa famille à Abu Dhabi, puis 16 ans avant de trouver le coeur cosmogonique dans les fonds océaniques par la pratique du surf en Sud-Vendée. Sociologue à ses heures sérieuses, elle utilise ses différents clones pour épancher au mieux sa soif d'activités : enseignante en sociologie, chercheur dans les domaines de la mode, de la consommation, des addictions et des risques, ingénieur-formateur de Jeunes en Service Civique, responsable du Groupe d'Etude sur la Mode, secrétaire du Longeville Surf Club, et maman comblée.
Emilie a publié dans Les Cahiers
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Qui ne s'est jamais assis sur un banc à regarder passer les passants ? Leurs démarches. Leurs postures. Leurs manières d'avancer. Leurs manières de marcher, de flâner ou de courir. Leurs façons d'occuper l'espace. Leurs manières de vivre, d'être, de se montrer dans cet espace. Les modulations de leur corps et de leurs apparences au sein de cet espace. Cet espace c'est la rue. Ce que l'on y observe c'est la mode. Ce regard est le mien, le votre, le sien, le notre ; c'est le regard de l'inconscient collectif qui, à travers les corps individuels, dessinent le corps collectif.
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Une belle session de surf commence souvent très tôt et combine à peu près toutes les conditions citées en introduction : une météo douce et ensoleillée, des lumières et des couleurs d’exception, des vagues qui déroulent parfaitement, des amis avec qui partager ces instants et surtout le sentiment d’être “au bon endroit, au bon moment”. Comme en amour, la passion du surf exige des sacrifices pour pouvoir savourer de tels moments privilégiés. Se lever à l’aube en fait partie, enfiler une combinaison en néoprène déjà mouillée et entrer dans une eau à 8° en plein hiver participe également à ce dévouement. Par amour du surf, dominé par un désir irrépressible de glisser sur ces parois d’eau, le surfeur affronte toutes les conditions, et se confronte aux éléments naturels qui se révèlent parfois coriaces et puissants. Pour atteindre l’osmose durant quelques secondes, le surfeur est guidé par une force intrépide qui le pousse à se faire malmener par les vagues pendant de longues minutes, à ramer vigoureusement vers elles, puis avec l’une d’entre elles, pour enfin ne faire plus qu’un avec celle-ci. Aucune explication rationnelle ne saurait résumer cette attraction infinie et permanente du surfeur à ces courbes sinueuses, ce lien mystique et onirique qui unit le pratiquant à la puissante mécanique océanique. Il s’agit tout à la fois d’une recherche de détente et d’adrénaline, d’une quête d’évasion et d’action, d’une déconnexion à la terre et de (re) connexion à l’élément aquatique, primordial et fécond. La vague, élément à la fois imprévisible et cyclique, sorte de symbole sublime de l’énergie féminine, est objet de fascination (voire d’incantations) pour les surfeurs. Assombrie dans la profondeur abyssale du “tube”, ou illuminée par les rayons du soleil qui traverse son enveloppe, la vague apparaît comme une création artistique de Dame Nature, qu’il faut savoir célébrer, en dépit (ou surtout du fait) de son caractère éphémère. Dans cet imaginaire du clair–obscur, monde de la vie et monde du dessous, la poésie océanique des vagues fonctionne comme le mana, véritable puissance spirituelle qui réanime chez les surfeurs de puissants archétypes mythiques, façonne en eux un rapport unique aux éléments cosmogoniques, et se transmet tel un savoir ésotérique.
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Le luxe tout comme le devenir animal se caractérise alors par la cyclicité, schème imaginaire de la renaissance périodique et du mouvement qui renvoie au schème de l’animé. Ainsi, dans la mythologie postmoderne, luxus - désignant étymologiquement l’excès – en délaissant la pureté de l’ornemental mettra en scène le retour des émotions et des humeurs profondes, de la bestialité de nos instincts et pulsions. En somme le retour du barbare en chacun de nous. Qu’en est-il donc de l’animal luxus : luxe animal ou excès de l’âme ?